Access to Information Orders

Informations sur la décision

Résumé :

L’appelant a présenté à l’université, aux termes de la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée (la Loi), une demande d’accès à des renseignements le concernant qui se trouvaient dans les bureaux d’un département particulier de l’université, y compris, sans s’y limiter, ceux des membres du personnel qu’il a nommés dans sa demande. L’université a invoqué l’alinéa 49 b) (vie privée) et la disposition 3 du paragraphe 65 (6) (emploi ou relations de travail) pour refuser l’accès à des renseignements pertinents. L’appelant a interjeté appel de la décision de l’université et affirmé que celle-ci n’avait pas effectué de recherches raisonnables pour localiser des documents pertinents. Dans la présente ordonnance, l’arbitre conclut que l’université a effectué des recherches raisonnables pour localiser de tels documents, que la partie pertinente du document 362 fait l’objet d’une exception en vertu de l’alinéa 49 b) (vie privée) de la Loi et que la disposition 3 du paragraphe 65 (6) soustrait à l’application de la Loi les autres documents qui sont en cause. L’appel est rejeté.

Contenu de la décision

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ORDONNANCE PO-4138

Appel PA18-00630

Université d’Ottawa

Le 14 avril 2021

Résumé : L’appelant a présenté à l’université, aux termes de la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée  (la Loi ), une demande d’accès à des renseignements le concernant qui se trouvaient dans les bureaux d’un département particulier de l’université, y compris, sans s’y limiter, ceux des membres du personnel qu’il a nommés dans sa demande. L’université a invoqué l’alinéa 49  b) (vie privée) et la disposition 3 du paragraphe 65 (6)  (emploi ou relations de travail) pour refuser l’accès à des renseignements pertinents. L’appelant a interjeté appel de la décision de l’université et affirmé que celle-ci n’avait pas effectué de recherches raisonnables pour localiser des documents pertinents. Dans la présente ordonnance, l’arbitre conclut que l’université a effectué des recherches raisonnables pour localiser de tels documents, que la partie pertinente du document 362 fait l’objet d’une exception en vertu de l’alinéa 49  b) (vie privée) de la Loi et que la disposition 3 du paragraphe 65 (6)  soustrait à l’application de la Loi les autres documents qui sont en cause. L’appel est rejeté.

Dispositions législatives pertinentes : Paragraphe 2 (1) (définition de « renseignements personnels »), paragraphe 21 (1), alinéa 21 (2) a), alinéa 21 (2) f), article 24, alinéa 49 b) et disposition 3 du paragraphe 65 (6)  de la Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée , L.R.O. 1990, chap. F.31 , telle que modifiée.

Ordonnance pertinente : Ordonnance P-1014.

CONTEXTE

[1] L’appelant était à la fois étudiant et employé de l’Université d’Ottawa (l’université). Préoccupé par une interaction avec une professeure concernant son emploi de surveillant d’examen et par la réaction de l’université à ses préoccupations, il a déposé un grief en vertu d’une convention collective. Il a ensuite déposé un second grief en raison de questions soulevées lors d’une réunion portant sur le premier grief.

[2] L’appelant a ensuite envoyé à l’Université d’Ottawa une demande d’accès aux renseignements suivants pour la période allant du 1er janvier 2017 jusqu’à la date de sa demande :

…tous les documents qui se réfèrent à moi (numéro étudiant : [numéro spécifique]) dans les bureaux des membres du personnel suivant :

Les bureaux de [département nommé de l’université], incluant, mais non limité aux membres du personnel suivant :

1. Personne nommée, doyen.

2. Personne nommée, vice-doyenne.

3. Personne nommée, directrice, Centre des services aux étudiants.

4. Personne nommée, directeur, [programme nommé].

5. Personne nommée, professeure.

6. Personne nommée, responsable des opérations scolaires.

7. Personne nommée, administratrice scolaire aux études supérieures.

8. Personne nommée, agente, cheminement et opérations scolaires.

[3] Il a également demandé :

… que tous les documents que se réfèrent à moi, incluant les courriels échangés entre membres du personnel, notes de travail, mémos, etc., [soient fournis] en version électronique ainsi qu’en version papier, me soient remis sur un CD. Prière de limiter la portée de cette recherche aux documents datés entre le 1er janvier 2017 et ce jour.

[4] L’université a localisé des documents pertinents et a délivré une lettre de décision accordant un accès partiel à ces documents. Elle a invoqué l’exception énoncée au paragraphe 21 (1), seule ou avec celle de l’alinéa 49 b) (vie privée), ainsi que l’exclusion énoncée au paragraphe 65 (6) (emploi ou relations de travail) de la Loi  pour refuser l’accès à des documents ou parties de documents. L’université a également affirmé que certains renseignements contenus dans les documents n’étaient pas pertinents et a refusé de les divulguer pour cette raison. Elle a joint à sa lettre de décision un index des documents numérotant les documents pertinents en cause et énonçant sa position concernant chaque document.

[5] L’appelant a interjeté appel de la décision de l’université.

[6] Pendant la médiation, l’appelant a indiqué à la médiatrice qu’il était d’avis que des documents supplémentaires devaient exister. Il a précisé qu’il demandait l’accès aux documents contenant uniquement des renseignements personnels le concernant. L’appelant a confirmé qu’il ne demandait pas l’accès aux documents qui contenaient des renseignements personnels concernant d’autres particuliers, y compris les informations non divulguées conformément à l’article 21  de la Loi , ni des renseignements non pertinents.

[7] L’appelant a également précisé qu’il demandait l’accès aux documents non divulgués conformément au paragraphe 65 (6), et malgré le fait qu’il n’ait pas demandé l’accès aux renseignements personnels concernant d’autres particuliers pouvant être identifiés dans les documents, il a contesté la décision de l’université de ne pas divulguer les parties pertinentes du document 362 mentionné dans son index des documents, affirmant qu’elles sont visées par une exception aux termes du paragraphe 21 (1) ou de l’alinéa 49  b) de la Loi .

[8] La médiation n’ayant pas permis de régler le différend, l’appel est passé au stade de l’arbitrage, lors duquel j’ai décidé de mener une enquête en vertu de la Loi .

[9] Pour commencer, j’ai envoyé à l’université un avis d’enquête décrivant les faits et questions dans cet appel. L’université a présenté des observations, dont elle a demandé qu’une partie ne soit pas communiquée à l’appelant par souci de confidentialité. J’ai ensuite envoyé à l’appelant un avis d’enquête avec les observations non confidentielles de l’université. L’appelant a présenté une réponse, qui a été fournie à l’université pour qu’elle présente une réplique. L’université a fait savoir qu’elle s’appuyait sur ses observations antérieures.

[10] Dans la présente ordonnance, je conclus que l’université a effectué des recherches raisonnables pour localiser des documents pertinents, que la partie pertinente du document 362 fait l’objet d’une exception en vertu de l’alinéa 49 b) (vie privée) de la Loi et que la disposition 3 du paragraphe 65 (6) soustrait à l’application de la Loi les autres documents qui sont en cause. L’appel est rejeté.

DOCUMENTS

[11] Les documents en cause sont des courriels avec pièces jointes et d’autres documents concernant l’appelant.

QUESTIONS

  1. L’institution a-t-elle fait des recherches raisonnables pour localiser les documents?
  2. Des documents sont-ils soustraits à l’application de la Loi en vertu de la disposition 3 du paragraphe 65 (6)?
  3. Les renseignements en cause dans le document 362 sont-ils visés par l’exception obligatoire du paragraphe 21 (1) ou l’exception discrétionnaire prévue à l’alinéa 49 b)?

EXPOSÉ

Question A : L’institution a-t-elle fait des recherches raisonnables pour localiser les documents?

[12] Lorsque l’auteur d’une demande soutient qu’il existe d’autres documents que ceux que l’institution a identifiés, il faut alors décider si l’institution a fait des recherches raisonnables pour localiser les documents conformément à l’article 24 [1] . Si je suis convaincu que les recherches faites ont été raisonnables dans les circonstances, je confirmerai la décision de l’institution. Dans le cas contraire, je pourrai ordonner que des recherches supplémentaires soient effectuées.

[13] La Loi  n’exige pas que l’institution prouve sans l’ombre d’un doute qu’il n’existe pas d’autres documents. Cependant, l’institution doit présenter des preuves suffisantes démontrant qu’elle a déployé des efforts raisonnables pour identifier et localiser les documents pertinents [2] . Pour être pertinents, les documents doivent être « raisonnablement reliés » à la demande [3] .

[14] Une recherche raisonnable consiste pour un employé d’expérience, qui connaît le sujet de la demande, à déployer des efforts raisonnables pour localiser des documents qui sont raisonnablement reliés à la demande [4] .

[15] L’institution sera tenue de mener une autre recherche si elle ne produit pas une preuve suffisante démontrant qu’elle a déployé des efforts raisonnables pour identifier et localiser tous les documents pertinents dont elle a la garde ou le contrôle [5] .

[16] Bien qu’il soit rarement possible pour l’auteur d’une demande d’indiquer précisément quels documents l’institution n’a pas identifiés, il doit tout de même fournir une base raisonnable permettant de conclure que ces documents existent [6] .

[17] Si l’auteur de la demande manque de diligence en ne répondant pas aux demandes d’éclaircissements de l’institution, le CIPVP peut déterminer que l’institution a pris toutes les mesures raisonnables pour répondre à la demande [7] .

Prise en charge et médiation

[18] Comme il indiqué dans les documents de prise en charge de cet appel, avant de déposer son appel à notre bureau, l’appelant a envoyé au Bureau de l’accès à l’information et de la protection de la vie privée de l’université un courriel se lisant comme suit :

Concernant le dossier cité en objet, reçu le 20 septembre, je souhaite vous signaler que plusieurs documents sont manquants et qu’un nombre préoccupant de documents sont rejetés. J’ai la preuve que des documents échangés entre [personne nommée], directeur, [programme nommé], [personne nommée], vice-doyenne et le doyen [Personne nommée] (notamment) ont été omis et devraient être divulgués en vertu de la loi.

Quelle approche suggérez-vous? … .

[19] L’université a répondu :

Dans le but de résoudre cette affaire de façon informelle, pourriez-vous nous fournir plus de détails quant aux documents manquants, tel que la date, l’heure, etc. Lorsque nous aurons obtenu ces détails nous demanderons aux gens concernés de faire une recherche additionnelle.

[20] L’appelant a répondu :

Je crains que cela ne soit pas possible. Et ce, afin de garantir l’imputabilité des responsables.

Également, dévoiler ces informations permettrait dans certains cas d’identifier la source d’information. Et ainsi, rendre cette source susceptible de représailles.

[21] L’université a répondu :

Puisque vous n’êtes pas en mesure de nous fournir de plus amples renseignements, l’Université d’Ottawa n’est donc pas prête à effectuer une recherche additionnelle. Par conséquent, nous vous suggérons de profiter du processus d’appel tel que détaillé dans notre lettre du 13 septembre dernier.

[22] Pendant la médiation, l’appelant a réitéré ses réserves concernant les recherches que l’université avait effectuées pour localiser des documents pertinents, et il a fait savoir ce qui suit au médiateur :

  • il n’avait pas reçu de notes des personnes nommées dans sa demande;
  • il a répété que quelqu’un lui avait fait savoir que des courriels supplémentaires ne lui avaient pas été divulgués;
  • la vice-doyenne nommée dans sa demande lui a dit qu’elle ne divulguerait pas une lettre qu’elle avait envoyée au doyen;
  • il savait que quelqu’un avait dit à la professeure nommée dans sa demande de porter plainte à son sujet, mais il n’avait reçu aucun renseignement corroborant cette affirmation;
  • il n’avait reçu aucune lettre.

[23] Également pendant la médiation, la directrice, conformité, accès à l’information et protection de la vie privée de l’université a fait savoir ce qui suit au médiateur :

  • Elle avait demandé au personnel tous les renseignements concernant l’appelant, y compris les notes et notes de service. Cependant, elle a ajouté que tous ne prenaient pas de notes.
  • Pour localiser des courriels supplémentaires, elle avait besoin de certains renseignements, comme la période concernée et l’identité des destinataires et expéditeurs des courriels, et l’appelant n’avait pas fourni ces renseignements. Elle a dit avoir demandé aux membres du personnel nommés dans la demande de l’appelant de localiser les courriels le concernant.
  • Elle a parlé à la vice-doyenne nommée par l’appelant, laquelle a confirmé qu’elle n’avait jamais dit à l’appelant qu’elle écrirait une lettre au doyen à son sujet. Elle a également confirmé n’avoir jamais écrit une lettre au doyen au sujet de l’appelant.
  • Certains des documents du genre que l’appelant voulait obtenir n’ont pas été divulgués car ils étaient exclus aux termes de la disposition 3 du paragraphe 65 (6)  de la Loi .

Observations de l’université pendant l’enquête

[24] L’université a fait valoir que l’appelant avait spécifiquement demandé que la recherche soit effectuée dans les documents de huit employés d’un département particulier de l’université, et une recherche a été effectuée dans les dossiers de ces huit personnes. Elle a ajouté :

Afin d’assurer une recherche exhaustive des documents visés par la demande, la recherche a été effectuée par six employés chevronnés supplémentaires de l’école de [département nommé de l’université].

[25] À l’appui de sa position selon laquelle elle avait effectué des recherches raisonnables, l’université a joint un affidavit d’une personne portant le titre de directrice, accès à l’information et chef de la protection de la vie privée de l’université (la « directrice ») décrivant en détail les mesures prises pour localiser des documents pertinents.

[26] La directrice a affirmé que dans le cadre des recherches, son bureau avait envoyé un courriel au directeur adjoint des opérations du département de l’université que l’appelant avait nommé dans sa demande pour « coordonner la recherche des documents pertinents dans cette affaire ». Le directeur adjoint a ensuite envoyé un courriel à chacune des personnes nommées dans la demande de l’appelant, leur demandant de localiser les documents demandés. Comme il est indiqué dans ce courriel, il a également invité les destinataires à acheminer cette demande à quiconque pouvait également disposer des documents demandés.

[27] La directrice a reçu les résultats des recherches des huit personnes nommées dans la demande de même que de six autres personnes, et a décrit leurs réponses dans son affidavit.

[28] L’université a affirmé que les documents visés par la demande avaient été transmis au Bureau de l’accès à l’information et de la protection de la vie privée. L’université a fait valoir qu’elle avait effectué des recherches raisonnables pour localiser des documents pertinents, et qu’elle avait donc respecté ses obligations en vertu de la Loi .

Observations de l’appelant pendant l’enquête

[29] L’appelant a continué d’affirmer que l’université n’avait pas mené des recherches raisonnables pour localiser des documents pertinents. Il a affirmé :

J’estime que l’université n’a pas déployé de réels efforts raisonnables pour identifier et localiser les documents demandés, mais a plutôt fait preuve de foi. Notamment l’université a persisté à ignorer les précisions que je lui ai communiqué afin de bien orienter la recherche.

Vous verrez en Annexe 1 que [vice-doyenne nommée] fait également référence à une lettre qu’elle aurait transmise au doyen. Elle écrit : « Vous avez ensuite poussé la situation en continuant de contacter de manière insistante voir même agressive certains membres du bureau de l’école, au point où le bureau des relations de travail a dû intervenir pour demander que vous cessiez d’entrer en contact avec ces derniers. Une lettre a été acheminée au doyen de l’école à cet effet. » Or, cette lettre n’apparaît pas dans les documents divulgués. II s’agit pourtant d’un élément clé de la présente requête. Ce même message fait aussi référence à des communications à mon sujet entre la direction, des professeurs et du personnel administratif.

Pourtant, aucun de ces documents n’a été divulgué. Par ailleurs, les messages présentés en annexes n’ont pas, eux-mêmes, été divulgués [8] . Cela fait la démonstration sans équivoque que les recherches entreprises ne sont pas complètes et/ou que l’université cache de l’information de manière illégitime.

Réplique de l’université pendant l’enquête

[30] Dans sa réplique, l’université a affirmé :

Nous nous appuyons sur nos observations antérieures dans cette affaire qui traitent en détail les observations de l’appelant à l’égard du caractère raisonnable de la recherche ainsi que l’application de l’exclusion et les exceptions invoquées.

Analyse et constatation

[31] L’appelant a allégué que l’université « persiste à ignorer les précisions que je lui ai communiquées afin de bien orienter la recherche » et qu’« aucun de ces documents n’a été divulgué ». Cependant, à mon avis, les mesures que l’université a prises pour localiser des documents pertinents, et ses autres mesures prises aux stades de la prise en charge et de la médiation, démontrent que l’université n’a pas ménagé ses efforts pour mener des recherches raisonnables conformément à ses obligations en vertu de la Loi . En outre, il semble que l’appelant n’ait pas fourni les renseignements que l’université lui avait demandés pour mener une recherche plus ciblée. Comme il est indiqué plus haut, l’appelant a également un rôle à jouer pour aider l’université à localiser des documents, et particulièrement ceux dont on lui aurait dit qu’ils existent.

[32] Je suis conscient du fait que d’après l’appelant, la preuve démontre que l’université n’a pas mené des recherches raisonnables pour localiser des documents pertinents; cependant, comme il est décrit plus loin, bon nombre des documents auxquels il demande l’accès sont soustraits à l’application de la Loi en vertu de la disposition 3 du paragraphe 65 (6). C’est pourquoi il n’a pas reçu les types de documents qui, selon lui, ne lui ont pas été fournis. En particulier, les deux exemples de courriels que l’appelant a joints à ses observations semblent être du type de ceux qui sont exclus en vertu de la disposition 3 du paragraphe 65 (6)  de la Loi . Si des documents sont exclus aux termes de la Loi , je ne peux pas ordonner à l’université de les divulguer; dans les circonstances, je considère donc qu’il ne servirait à rien d’ordonner à l’université d’identifier les types de documents qui sont exclus en vertu de la disposition 3 du paragraphe 65 (6).

[33] Comme indiqué plus haut, une recherche raisonnable consiste pour un employé d’expérience, qui connaît le sujet de la demande, à déployer des efforts raisonnables pour localiser des documents qui sont raisonnablement reliés à la demande [9] . À mon avis, la directrice est une telle employée d’expérience qui connaît également le sujet de la demande.

[34] Je considère qu’elle m’a fourni des preuves suffisantes démontrant qu’elle a déployé des efforts raisonnables pour identifier et localiser les documents pertinents dont l’université avait la garde ou le contrôle.

[35] La Loi  n’oblige pas l’université à prouver avec une certitude absolue qu’il n’existe pas d’autres documents, mais uniquement à faire en sorte qu’un employé d’expérience, qui connaît le sujet de la demande, déploie des efforts raisonnables pour localiser des documents qui sont raisonnablement reliés à la demande. Comme je l’ai expliqué plus haut, j’estime que c’est ce qu’elle a fait.

[36] Je conclus donc que l’université a fait des recherches raisonnables pour localiser des documents pertinents.

Question B : Des documents sont-ils soustraits à l’application de la Loi en vertu de la disposition 3 du paragraphe 65 (6)?

[37] L’université soutient que les documents qui restent en cause (à l’exception du document 362) sous soustraits à l’application de la Loi en vertu de la disposition 3 du paragraphe 65 (6), qui est libellée comme suit :

Sous réserve du paragraphe (7), la présente loi ne s’applique pas aux documents recueillis, préparés, maintenus ou utilisés par une institution ou pour son compte à l’égard de ce qui suit :

Les réunions, les consultations, les discussions ou les communications, en ce qui a trait aux relations de travail ou à des questions en matière d’emploi, dans lesquelles l’institution a un intérêt.

[38] Si le paragraphe 65 (6) s’applique aux documents et qu’aucune des exceptions prévues au paragraphe 65 (7) ne s’applique, les documents sont soustraits à l’application de la Loi.

[39] Pour que la collecte, la préparation, le maintien ou l’utilisation d’un document se fasse « à l’égard » des sujets mentionnés aux dispositions 1, 2 ou 3 de ce paragraphe, il doit être raisonnable de conclure qu’il existe un rapport quelconque entre eux [10] .

[40] Le critère du « rapport quelconque » prévoit qu’il doit y avoir un rapport qui est pertinent dans le cadre du mécanisme et de l’objet de la Loi  dans le contexte en question. Par exemple, le rapport entre les relations de travail et des documents comptables qui décrivent les dépenses d’une institution au titre des services juridiques et autres dans le cadre de négociations collectives n’est pas suffisant pour être conforme au critère du « rapport quelconque » [11] .

[41] L’expression « relations de travail » s’entend des relations entre une institution et ses employés régies par la législation sur les négociations collectives, ou de relations semblables. L’expression « relations de travail » n’est pas limitée au contexte des relations entre un employeur et ses employés [12] .

[42] L’expression « emploi d’une personne » désigne la relation entre un employeur et un employé. L’expression « questions en matière d’emploi » renvoie aux questions liées aux ressources humaines ou aux relations de travail découlant du rapport entre un employeur et un employé autres que celles régies par la négociation collective [13] .

[43] Si le paragraphe 65 (6) s’appliquait au moment où les renseignements ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés, il ne cesse pas de s’appliquer à une date ultérieure [14] .

[44] Les documents que le paragraphe 65 (6) soustrait à l’application de la Loi ont trait à des questions où l’institution agit à titre d’employeur et qui concernent des modalités d’emploi ou des questions touchant les ressources humaines. Les questions en matière d’emploi sont distinctes des questions touchant les actes des employés [15] .

Disposition 3 du paragraphe 65 (6) : questions dans lesquelles l’institution a un intérêt

[45] Pour que la disposition 3 du paragraphe 65 (6) s’applique, l’institution doit démontrer que:

  1. les documents ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés par elle ou pour son compte;
  2. les documents ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés à l’égard de réunions, de consultations, de discussions ou de communications; et
  3. les réunions, consultations, discussions ou communications avaient trait aux relations de travail ou à des questions en matière d’emploi, dans lesquelles l’institution a un intérêt.

[46] Il a été établi que l’expression « en ce qui a trait aux relations de travail ou aux questions en matière d’emploi » s’applique dans les contextes suivants:

  • un concours d’emploi [16] ;
  • le congédiement d’un employé [17] ;
  • un grief en vertu d’une convention collective [18] ;
  • un programme de départ volontaire [19] ;
  • un examen du volume de travail et des relations de travai [20] .

[47] On a jugé que l’expression « en ce qui a trait aux relations de travail ou aux questions en matière d’emploi » ne s’appliquait pas dans les contextes suivants :

  • une étude organisationnelle ou opérationnelle [21] ;
  • un litige dans lequel l’institution peut être reconnue responsable des actions de ses employés [22] .

[48] L’« intérêt » que l’institution a dans ces questions doit être plus qu’une simple curiosité ou préoccupation. Ces questions font intervenir les employés de l’institution [23] .

[49] Les documents recueillis, préparés, maintenus ou utilisés par l’institution sont exclus uniquement si les réunions, consultations, discussions ou communications concernent les relations de travail ou des « questions en matière d’emploi » dans lesquelles l’institution a un intérêt. Les questions en matière d’emploi sont distinctes des questions touchant les actes des employés [24] .

[50] Si les documents tombent sous le coup d’une des exceptions prévues au paragraphe 65 (7) , la Loi  s’applique à ces documents. Le paragraphe 65 (7) est libellé comme suit :

La présente loi s’applique aux documents suivants :

1. Un accord conclu entre une institution et un syndicat.

2. Un accord conclu entre une institution et un ou plusieurs employés qui met fin à une instance devant un tribunal judiciaire ou administratif ou une autre entité en ce qui a trait aux relations de travail ou à des questions en matière d’emploi.

3. Un accord conclu entre une institution et un ou plusieurs employés à la suite de négociations entre l’institution et l’employé ou les employés au sujet de questions en matière d’emploi.

4. Un compte de dépenses soumis par un employé d’une institution à cette dernière aux fins de remboursement des dépenses qu’il a engagées dans le cadre de son emploi.

Observations de l’université

[51] L’université a fait valoir que les documents suivants sont visés par la disposition 3 du paragraphe 65 (6), et sont donc soustraits à l’application de la Loi : documents 147 à 165, 167 à 176, 181 à 184, 186, 187, 189, 190, 204 à 235, 238 à 253, 255 à 260, 267, 269, 270, 272 à 280, 282 à 287, 291 à 309, 316 à 342, 345 à 352, 354 à 356, 361, 365 à 369, 371 à 380, 382 à 394, 398 à 407 et 410 à 415.

[52] L’université a affirmé qu’au moment où les documents en question ont été créés, l’appelant était un surveillant d’examen. Elle explique :

… Les relations entre l’Université d’Ottawa et le personnel syndiqué avec tâches d’assistanat d’enseignement, d’assistanat de recherche, de tutorat, de démonstration, de correction, de surveillance d’examens ou de monitorat de laboratoire sont régies par la convention collective (la « convention collective ») conclue entre l’Université d’Ottawa et le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) - Locale 2626. En conséquence, toutes les questions de relations de travail entre l’Université d’Ottawa et les membres du SCFP sont traitées conformément à la convention collective.

En ce qui concerne les documents en question, l’université agissait à tout moment en tant qu’employeur et les conditions d’emploi étaient en cause. Les dossiers contiennent également des conseils fournis à la direction en matière de relations de travail et d’emploi.

[53] L’université a fait valoir que les documents sont assujettis à l’exclusion de la disposition 3 du paragraphe 65 (6) parce qu’ils concernent généralement des consultations, des discussions et des communications sur les relations de travail et des questions relatives à l’emploi impliquant l’appelant.

[54] L’université a affirmé que ces documents appartiennent à une ou plusieurs des catégories générales suivantes :

Documents concernant le comportement de l’appelant dans le milieu de travail;

Suspension du contrat de travail de l’appelant;

Grief déposé par l’appelant en vertu de la convention collective.

[55] L’université a soutenu que les documents mentionnés ci-haut avaient été recueillis, préparés, maintenus et utilisés par des employés de l’université pour des réunions, consultations, discussions et communications sur des questions de relations de travail et liées à l’emploi qui intéressent l’université.

Observations de l’appelant

[56] L’appelant a accusé l’université « de soustraire une quantité excessive d’information sous de faux prétextes » et n’est pas d’accord avec le fait que ces documents ont trait à des questions en matière d’emploi comme le prétend l’université.

[57] Il a déclaré :

… il est faux de prétendre que l’université agissait strictement à titre d’employeur, tel que le prétend à maintes reprises pour justifier sa décision. En effet, l’université a sciemment confondu mes rôles d’étudiant et d’employé et en fait la preuve dans ses communications à mon endroit. […] Notamment, la vice-doyenne a proféré des menaces à mon statut d’étudiant et m’a communiqué une série de reproches lors de l’éclatement du conflit qui reposait pourtant sur mon rôle d’employé. Aussi, de nombreux acteurs de ce conflit, dont [la directrice, Centre des services aux étudiants, nommée dans sa demande], agissait au nom de l’employeur et à titre académique. Ainsi, de nombreux documents demandés et/ou censurés portent à la fois sur les relations de travail ET sur mes activités et relations avec le personnel à titre d’étudiant. Puisque l’université a confondu les rôles, elle ne peut aujourd’hui prétendre qu’il s’agit strictement de relations de travail.

[58] À l’appui de sa position, il a mentionné une copie d’un courriel qu’il a inclus dans ses observations et qu’il avait reçu de la part d’une autre personne nommée dans sa demande :

Vous verrez en Annexe 1 que [vice-doyenne nommée] fait également référence à une lettre qu’elle aurait transmise au doyen. Elle écrit : « Vous avez ensuite poussé la situation en continuant de contacter de manière insistante voir même agressive certains membres du bureau de l’école, au point où le bureau des relations de travail a dû intervenir pour demander que vous cessiez d’entrer en contact avec ces derniers. Une lettre a été acheminée au doyen de l’école à cet effet. » Or, cette lettre n’apparait pas dans les documents divulgués. II s’agit pourtant d’un élément clé de la présente requête. Ce même message fait aussi référence à des communications à mon sujet entre la direction, des professeurs et du personnel administratif.

Analyse et conclusion

[59] Le CIPVP a statué à maintes reprises que les exclusions du paragraphe 65 (6)  de la Loi  (et de la disposition équivalente de la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée) s’appliquent à des documents et à des faits précis. C’est dire que pour établir qu’un document est exclu, il faut l’examiner dans son ensemble. L’université soutient que les documents en cause (sauf le document 362, dont nous traitons plus loin) sont soustraits à l’application de la Loi en vertu de la disposition 3 du paragraphe 65 (6). Comme il est indiqué plus haut, pour que la disposition 3 du paragraphe 65 (6) s’applique, l’université doit établir que :

  1. les documents ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés par l’université ou pour son compte;
  2. les documents ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés à l’égard de réunions, de consultations, de discussions ou de communications;
  3. les réunions, consultations, discussions ou communications avaient trait aux relations de travail ou à des questions en matière d’emploi, dans lesquelles l’université a un intérêt.

[60] Je dirai d’abord que je suis convaincu que tous les documents qui n’ont pas été divulgués, et qui se composent surtout de séries de courriels et de pièces jointes, ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés par l’université. J’estime que ces documents ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés à l’égard de réunions, de consultations, de discussions ou de communications ayant trait aux relations de travail ou à des questions en matière d’emploi touchant à la fois l’appelant et d’autres employés de l’université. Ces documents ont trait notamment à l’emploi de l’appelant en tant que surveillant d’examen, à sa conduite pendant son emploi, à son allégation selon laquelle il n’avait pas été bien traité par des employés de l’université et à ses griefs. Je souligne que les documents concernant les études de l’appelant lui ont été divulgués. Je considère que les premier et deuxième volets du critère de la disposition 3 du paragraphe 65 (6) sont respectés.

[61] Pour établir que le troisième volet du critère mentionné à la disposition 3 du paragraphe 65 (6) est respecté, l’université devait fournir une preuve montrant que les réunions, consultations, discussions ou communications qui ont eu lieu ont porté sur les relations de travail ou des questions en matière d’emploi dans lesquelles l’université a un intérêt.

[62] Les documents qui, selon l’université, sont exclus aux termes de la disposition 3 du paragraphe 65 (6)  de la Loi  ont trait à la conduite de l’appelant dans le contexte de son emploi, ou ont été créés dans le contexte de son emploi, et portent généralement sur les préoccupations de l’appelant quant à la conduite de ses superviseurs, sur la conduite de l’appelant à son emploi ou sur les griefs de l’appelant. Dans ce sens, ils ont trait à l’incidence de ces événements sur l’emploi de l’appelant et sur d’autres employés de l’université. Étant donné que ces documents ont trait à des questions relatives à la conduite des employés et aux rapports entre eux, ils portent manifestement sur la gestion par l’université de son propre personnel.

[63] Je reconnais que l’université a un intérêt dans les questions qui ont trait à son personnel, lequel comprend l’appelant et les autres personnes énumérées dans sa demande. Ces documents contiennent des renseignements à l’égard desquels l’université agit à titre d’employeur et qui concernent des modalités d’emploi ou des questions touchant les ressources humaines. Ayant examiné ces documents, je suis convaincu que les discussions et communications qu’ils relatent portent sur des questions en matière d’emploi et des questions touchant les relations de travail dans lesquelles l’université a un intérêt. Par conséquent, j’estime que le troisième volet du critère de la disposition 3 du paragraphe 65 (6) est respecté. Je conclus également qu’aucune des exceptions du paragraphe 65 (7) ne s’applique.

[64] Ma conclusion voulant que les trois volets du critère de la disposition 3 du paragraphe 65 (6) soient respectés s’appuie sur le fait que certains des documents comprennent des courriels rédigés par l’appelant, que ce dernier aurait déjà en sa possession. Cependant, dans ce contexte précis, j’estime que le fait que ces documents ont été recueillis, maintenus et utilisés en lien avec des questions ayant trait aux relations de travail ou des questions en matière d’emploi dans lesquelles l’université a un intérêt fait en sorte qu’ils sont également visés par l’exclusion de la disposition 3 du paragraphe 65 (6), sans égard à leur provenance [25] .

Question C : Les renseignements en cause dans le document 362 sont-ils visés par l’exception obligatoire du paragraphe 21 (1) ou l’exception discrétionnaire prévue à l’alinéa 49 b)?

Exceptions liées à la vie privée

[65] Le paragraphe 47 (1) de la Loi  confère aux particuliers le droit général d’accéder aux renseignements personnels les concernant dont une institution a la garde. L’article 49 prévoit un certain nombre d’exceptions à ce droit.

[66] En vertu de l’alinéa 49 b), qui se trouve dans la partie III de la Loi, si un document contient des renseignements personnels sur l’auteur de la demande et sur un autre particulier, et si la divulgation de ces renseignements représenterait une atteinte injustifiée à la vie privée de cet autre particulier, l’institution peut refuser de divulguer ces renseignements à l’auteur de la demande.

[67] Par contre, en vertu du paragraphe 21 (1), qui se trouve dans la partie II, lorsqu’un document contient des renseignements personnels sur un autre particulier, mais pas sur l’auteur de la demande, l’institution ne peut divulguer ces renseignements à moins que ne s’applique l’une des exceptions prévues aux alinéas 21 (1) a) à e) ou que la divulgation ne soit pas une atteinte injustifiée à la vie privée [l’exception énoncée à l’alinéa 21 (1) f)].

[68] En l’occurrence, l’université affirme que la divulgation du document représenterait une atteinte injustifiée à la vie privée d’un autre particulier.

Le document 362 contient-il des « renseignements personnels »?

[69] Pour déterminer si l’exception prévue au paragraphe 21 (1) ou celle prévue à l’alinéa 49 b) peut s’appliquer, il faut établir si les documents contiennent des « renseignements personnels » et, le cas échéant, à qui ces renseignements ont trait. Cette expression est définie au paragraphe 2 (1)  de la Loi  :

« renseignements personnels » Renseignements consignés ayant trait à un particulier qui peut être identifié. S’entend notamment :

a) des renseignements concernant la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial ou familial de celui-ci;

b) des renseignements concernant l’éducation, les antécédents médicaux, psychiatriques, psychologiques, criminels ou professionnels de ce particulier ou des renseignements reliés à sa participation à une opération financière;

c) d’un numéro d’identification, d’un symbole ou d’un autre signe individuel qui lui est attribué;

d) de l’adresse, du numéro de téléphone, des empreintes digitales ou du groupe sanguin de ce particulier;

e) de ses opinions ou de ses points de vue personnels, sauf s’ils se rapportent à un autre particulier;

f) de la correspondance ayant explicitement ou implicitement un caractère personnel et confidentiel, adressée par le particulier à une institution, de même que des réponses à cette correspondance originale susceptibles d’en révéler le contenu;

g) des opinions et des points de vue d’une autre personne au sujet de ce particulier;

h) du nom du particulier, s’il figure parmi d’autres renseignements personnels qui le concernent, ou si sa divulgation risque de révéler d’autres renseignements personnels au sujet du particulier.

[70] La liste d’exemples donnée au paragraphe 2 (1) n’est pas exhaustive. Par conséquent, des renseignements qui n’entrent pas dans les catégories mentionnées aux alinéas a) à h) peuvent tout de même être considérés comme des renseignements personnels [26] .

[71] Les paragraphes 2 (3) et (4) se rapportent également à la définition de renseignements personnels. Ils sont libellés comme suit :

(3) Les renseignements personnels excluent le nom, le titre, les coordonnées et la désignation d’un particulier qui servent à l’identifier par rapport à ses activités commerciales ou à ses attributions professionnelles ou officielles.

(4) Il est entendu que le paragraphe (3) s’applique même si le particulier exerce des activités commerciales ou des attributions professionnelles ou officielles depuis son logement et que ses coordonnées se rapportent à ce logement.

[72] Pour être considérés comme des renseignements personnels, les renseignements doivent avoir trait aux aspects personnels de la vie d’un particulier. En général, les renseignements qui concernent les aspects professionnels, officiels ou commerciaux de la vie d’un particulier ne sont pas considérés comme « ayant trait à un particulier » [27] .

[73] Cependant, si les renseignements concernent les aspects professionnels, officiels ou commerciaux d’un particulier, ils peuvent tout de même être considérés comme des renseignements personnels s’ils dévoilent une ou des choses de nature personnelle concernant ce particulier [28] .

[74] Pour que des renseignements soient considérés comme des renseignements personnels, il faut qu’on puisse raisonnablement s’attendre à ce que le particulier puisse être identifié si les renseignements sont divulgués [29] .

Observations de l’université

[75] L’université affirme que le document 362 contient des renseignements personnels concernant un employé de l’université :

Spécifiquement le document 362 consiste d’un courriel privé … [et] Les renseignements personnels de l’employé trait aux aspects personnels de sa vie.

[76] L’université est d’avis que les renseignements pertinents du document 362 sont visés par le facteur énoncé à l’alinéa 21 (2)  f) de la Loi  :

… car les renseignements sont de nature très délicate. … [Et] il est raisonnable de s’attendre à ce que la divulgation des enseignements en cause risque de causer une détresse personnelle importante. La divulgation des renseignements en cause constituerait une atteinte injustifiée à la vie privée.

Observations de l’appelant

[77] L’appelant a contesté la position de l’université, affirmant :

… Notamment, l’université affirme que l’information contenue dans ces documents est de nature très sensible. Je remets cela en doute puisque je n’ai plus de relation avec l’université. Il est important pour moi d’avoir accès au maximum d’info. Par ailleurs, je suis préoccupée que l’université menace de ne plus collaborer avec le commissariat dans le futur si jamais le contenu de ses documents étaient divulgués. Ces menaces sont hautement inappropriées et remettent en doute l’intégrité du processus en cours; l’université ne peut se substituer à la loi et à son application par les autorités gouvernementales.

Analyse et constatations

[78] À mon avis, le document 362 contient des renseignements personnels concernant son auteur, qui est un parent du destinataire, et ce dernier, qui était un employé de l’université; ces renseignements, parce qu’ils sont très personnels, sont visés par la définition de « renseignements personnels » du paragraphe 2 (1)  de la Loi . À cet égard, bien que le contexte semble être celui d’un emploi, la divulgation de son contenu révélerait des renseignements personnels sur l’auteur de ce document et son destinataire. De plus, j’estime que ce courriel contient aussi des renseignements personnels sur l’appelant, même si son nom n’y figure pas, en raison du contexte dans lequel il a été rédigé.

[79] Comme il est indiqué plus haut, en vertu de l’alinéa 49 b), qui se trouve dans la partie III de la Loi, si un document contient des renseignements personnels sur l’auteur de la demande et sur un autre particulier, et si la divulgation de ces renseignements représenterait une atteinte injustifiée à la vie privée de cet autre particulier, l’institution peut refuser de divulguer ces renseignements à l’auteur de la demande. Je dois donc déterminer si les renseignements pertinents sont visés par l’exception énoncée à l’alinéa 49  b) de la Loi .

[80] Aux fins de l’application de l’exception de l’alinéa 49 b), les paragraphes 21 (2) et (3) aident à déterminer si la divulgation constituerait ou non une atteinte injustifiée à la vie privée. De plus, le paragraphe 21 (4) énumère des situations qui ne constitueraient pas une atteinte injustifiée à la vie privée.

[81] Si les documents ne sont visés par aucune des présomptions prévues au paragraphe 21 (3), le paragraphe 21 (2) énumère différents facteurs qui pourraient être pertinents pour déterminer si la divulgation des renseignements personnels constituerait une atteinte injustifiée à la vie privée et si les renseignements seront soustraits à l’obligation de divulgation sauf si les circonstances sont favorables à la divulgation [30] .

[82] L’université affirme que le facteur énoncé à l’alinéa 21 (2) f) s’applique aux renseignements non divulgués contenus dans le document 362. L’appelant conteste l’application de cette disposition. Ses observations remettent aussi en cause les motifs et la bonne foi de l’université, soulevant ainsi le facteur de l’alinéa 21 (2) a).

[83] Les alinéas 21 (2) a) et f) sont libellés comme suit :

21 (2) Aux fins de déterminer si la divulgation de renseignements personnels constitue une atteinte injustifiée à la vie privée, la personne responsable tient compte des circonstances pertinentes et examine notamment si :

a) la divulgation est souhaitable parce qu’elle permet au public de surveiller de près les activités de l’institution;

f) les renseignements personnels sont d’une nature très délicate;

[84] Le facteur de l’alinéa 21 (2) a), s’il s’appliquait, tendrait à favoriser la divulgation des renseignements en cause, alors que le facteur de l’alinéa 21 (2) f) favoriserait leur non-divulgation.

Alinéa 21 (2) a) : surveillance

[85] Cet alinéa porte sur la divulgation en vue d’assujettir les activités du gouvernement (et non les opinions ou actes de particuliers) à la surveillance du public [31] . Le simple respect de procédures internes est souvent insuffisant et les institutions doivent prendre en considération l’obligation de rendre compte lorsqu’elles déterminent si la divulgation est souhaitable pour la fin énoncée à l’alinéa 21 (2) a) [32] .

[86] Dans l’ordonnance P-1014, l’arbitre a conclu que les politiques publiques favorisaient une « divulgation appropriée » dans des instances telles que l’enquête pour harcèlement en milieu de travail qui était visée dans l’appel en question, afin de promouvoir l’adhésion aux principes de la justice naturelle. L’arbitre a convenu avec l’appelant dans cet appel qu’un « degré approprié de divulgation aux parties » impliquées dans de telles enquêtes revêt beaucoup d’importance. Cependant, compte tenu des faits en cause dans cet appel, l’arbitre a conclu que « l’intérêt d’une partie à une instance dans la divulgation de renseignements sur cette instance est essentiellement de nature privée ». Donc, étant donné que l’appelant dans cette affaire souhaitait examiner les documents lui-même pour confirmer que « justice avait été faite dans cette enquête en particulier, dans laquelle il était impliqué », l’arbitre a conclu que le facteur énoncé à l’alinéa 21 (2) a) ne s’appliquait pas.

[87] À mon avis, l’analyse de l’arbitre dans l’ordonnance P-1014 me donne une certaine orientation dans l’affaire dont j’ai été saisi. En l’occurrence, je ne suis pas convaincu que l’appelant avait demandé l’accès aux documents pour des motifs autres que privés, pour confirmer que la conduite de l’université ou de ses employés à son égard était appropriée. Comme dans l’ordonnance P-1014, il s’agit d’un intérêt privé, et j’estime donc que l’alinéa 21 (2) a) n’est pas pertinent. J’ai également établi si, malgré l’intérêt privé de l’appelant dans le document, sa divulgation favoriserait la transparence de l’université, et je ne suis pas convaincu que ce serait le cas. Je conclus donc que le facteur de l’alinéa 21 (2) a) ne s’applique pas aux renseignements pertinents contenus dans le document 362.

Alinéa 21 (2) f) : nature très délicate des renseignements personnels

[88] Les renseignements sont jugés de nature très délicate lorsqu’on peut raisonnablement s’attendre à ce que leur divulgation risque de causer une détresse personnelle importante [33] . Le document en cause est un courriel entre parents constituant une correspondance personnelle et privée de nature délicate. Je suis convaincu qu’en raison de son sujet, sa divulgation risque de causer une détresse personnelle importante. J’estime donc que les renseignements personnels pertinents qui restent en cause dans le courriel que constitue le document 362 sont très délicats, et que le facteur énoncé à l’alinéa 21 (2) f) s’applique et pèse contre la divulgation des renseignements.

[89] Je conclus donc que le facteur énoncé à l’alinéa 21 (2) f) s’applique aux renseignements pertinents dans le document 362. J’ai conclu plus haut que l’alinéa 21 (2) a) ne s’applique pas. Contrairement à ce qu’affirme l’appelant, rien ne prouve que l’université ait menacé de ne pas coopérer à l’instance devant le CIPVP si je devais ordonner la divulgation des renseignements. Quoi qu’il en soit, une telle menace n’aurait aucune incidence sur ma décision de conclure ou non que les renseignements sont soustraits à la divulgation.

[90] Afin de déterminer si la divulgation des renseignements personnels contenus dans les documents constituerait une atteinte injustifiée à la vie privée en vertu de l’alinéa 49 b), le CIPVP doit évaluer les critères et les présomptions prévus aux paragraphes 21 (2) et (3) et établir un équilibre entre les intérêts des parties [34] . J’ai conclu plus haut que le facteur énoncé à l’alinéa 21 (2) f) s’applique aux renseignements pertinents dans le document 362. J’ai conclu également que l’alinéa 21 (2) a) ne s’applique pas et, à mon avis, aucun autre facteur n’est favorable à la divulgation. Ayant examiné et pesé les facteurs et les intérêts respectifs des parties, je conclus que la divulgation des renseignements pertinents dans le document 362 constituerait une atteinte injustifiée à la vie privée en vertu de l’alinéa 49 b).

[91] J’estime donc que ces renseignements font l’objet d’une exception en vertu de l’alinéa 49  b) de la Loi . Je suis également convaincu que l’université a exercé correctement le pouvoir discrétionnaire que lui confère l’alinéa 49 b) de ne pas divulguer à l’appelant les renseignements pertinents contenus dans le document 362. Je suis persuadé que l’université connaissait les motifs de la demande et savait pourquoi l’appelant voulait obtenir ces renseignements, et je n’ai trouvé aucune preuve de menace de la part de l’université, contrairement à l’allégation de l’appelant. Dans les circonstances, je suis convaincu que l’université, dans sa démarche, a tenu compte des raisons pour lesquelles l’appelant demandait l’accès aux renseignements, de la nature des renseignements en cause et de la question de savoir si l’appelant était un particulier ou une organisation. Tout compte fait, et pour les motifs énoncés plus haut, je confirme que l’université a exercé correctement son pouvoir discrétionnaire.

[92] Je conclus donc que la partie pertinente du document 362 fait l’objet d’une exception en vertu de l’alinéa 49  b) de la Loi .

[93] Enfin, compte tenu de la quantité de renseignements que l’appelant a déjà reçus et du contexte dans lequel le document 362 a été créé, je suis également convaincu que la partie pertinente du document 362 ne peut être raisonnablement extraite sans révéler des renseignements qui font l’objet d’une exception en vertu de l’alinéa 49 b) ou sans qu’il en résulte la divulgation de bribes inintelligibles de renseignements [35] .

ORDONNANCE

L’appel est rejeté.

Original signé par:

 

Le 14 avril 2021

Steven Faughnan

 

 

Arbitre

 

 

 



[1] Ordonnances P-85, P-221 et PO-1954-I.

[2] Ordonnances P-624 et PO-2559.

[3] Ordonnance PO-2554.

[4] Ordonnances M-909, PO-2469 et PO-2592.

[5] Ordonnance MO-2185.

[6] Ordonnance MO-2246.

[7] Ordonnance MO-2213.

[8] L’appelant a joint une copie d’une série de courriels à ses observations.

[9] Ordonnances M-909, PO-2469 et PO-2592.

[10] Ordonnance MO-2589; voir également Ministry of the Attorney General and Toronto Star and Information and Privacy Commissioner, 2010 ONSC 991 (Div. Ct.).

[11] Ordonnance MO-3664, Brockville (City) v. Information and Privacy Commissioner, Ontario, 2020 ONSC 4413 (Div Ct.).

[12] Ontario (Minister of Health and Long-Term Care) v. Ontario (Assistant Information and Privacy Commissioner), [2003] O.J. No. 4123 (C.A.); voir également l’ordonnance PO-2157.

[13] Ordonnance PO-2157.

[14] Ontario (Solicitor General) v. Ontario (Assistant Information and Privacy Commissioner) (2001), 55 O.R. (3d) 355 (C.A.), autorisation de pourvoi refusée [2001] A.C.S.C. n° 507.

[15] Ontario (Ministry of Correctional Services) v. Goodis, précitée.

[16] Ordonnances M-830 et PO-2123.

[17] Ordonnance MO-1654-I.

[18] Ordonnances M-832 et PO-1769.

[19] Ordonnance M-1074.

[20] Ordonnance PO-2057.

[21] Ordonnances M-941 et PO-1369.

[22] Ordonnances PO-1722 et PO-1905; Ontario (Ministry of Correctional Services) v. Goodis, précitée.

[23] Ontario (Solicitor General) v. Ontario (Assistant Information and Privacy Commissioner), précitée.

[24] Ontario (Ministry of Correctional Services) v. Goodis, précitée.

[25] Ordonnance PO-3390.

[26] Ordonnance 11.

[27] Ordonnances P-257, P-427, P-1412, P-1621, PO-2225 et R-980015.

[28] Ordonnances MO-2344, P-1409, PO-2225 et R-980015.

[29] Ordonnance PO-1880, confirmée en révision judiciaire dans Ontario (Attorney General) v. Pascoe, [2002] O.J. No. 4300 (C.A).

[30] Ordonnance P-239.

[31] Ordonnance P-1134.

[32] Ordonnance P-256.

[33] Ordonnances PO-2518, PO-2617, MO-2262 et MO-2344.

[34] Ordonnance MO-2954.

[35] Voir l’ordonnance PO-1663 et Ontario (Minister of Finance) v. Ontario (Information and Privacy Commissioner) (1997), 102 O.A.C. 71 (Div. Ct.).

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