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Résumé :

La Commission des services policiers d’Ottawa (la « police ») a reçu une demande d’accès à des renseignements relatifs à une plainte que l’appelant avait déposée à la Section des normes professionnelles du Service de police d’Ottawa. La police a localisé des documents pertinents, mais a affirmé qu’ils étaient soustraits à l’application de la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée (la « Loi ») en vertu de la disposition 1 du paragraphe 52 (3). La présente ordonnance conclut que les renseignements demandés par l’appelant ont été créés à la suite de sa plainte et qu’ils sont soustraits à l’application de la Loi en vertu de la disposition 1 du paragraphe 52 (3). L’appel est rejeté.

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ORDONNANCE MO-3634

Appel MA17-172

Commission des services policiers d’Ottawa

Le 10 juillet 2018

Résumé : La Commission des services policiers d’Ottawa (la « police ») a reçu une demande d’accès à des renseignements relatifs à une plainte que l’appelant avait déposée à la Section des normes professionnelles du Service de police d’Ottawa. La police a localisé des documents pertinents, mais a affirmé qu’ils étaient soustraits à l’application de la Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée  (la « Loi  ») en vertu de la disposition 1 du paragraphe 52 (3) . La présente ordonnance conclut que les renseignements demandés par l’appelant ont été créés à la suite de sa plainte et qu’ils sont soustraits à l’application de la Loi en vertu de la disposition 1 du paragraphe 52 (3). L’appel est rejeté.

Dispositions législatives pertinentes : Loi sur l’accès à l’information municipale et la protection de la vie privée , L.R.O. 1990, chap. M.56 , telle que modifiée, disposition 1 du paragraphe 52 (3).

Ordonnance pertinente : Ordonnance M-835.

CONTEXTE

[1]  La Commission des services policiers d’Ottawa (la « police ») a reçu une demande d’accès aux renseignements suivants en vertu de la Loi  :

  1. Enregistrement audiovisuel de l’entrevue du 24 février 2015 à 14 heures que j’ai accordée aux [sergents nommés] concernant le dossier [numéro de dossier] de la Section des normes professionnelles du Service de police d’Ottawa.
  2. Les déclarations écrites des agents et des autres membres du personnel du Service de police d’Ottawa, concernant le dossier [numéro de dossier] de la Section des normes professionnelles du Service de police d’Ottawa.
  3. La déclaration écrite de mon employeur, concernant le dossier [numéro de dossier] de la Section des normes professionnelles du Service de police d’Ottawa.

[2]  La police a localisé des documents pertinents et y a accordé un accès partiel, invoquant l’alinéa 8 (1) l) (entrave à la répression du crime) et le paragraphe 14 (1) (vie privée) de la Loi  pour refuser l’accès à certaines parties de ces documents. Quant à la partie de la demande portant sur l’accès à une déclaration écrite de l’employeur de l’auteur de la demande faite pendant l’enquête de l’agent de la Section des normes professionnelles sur la plainte, la police a fait savoir à l’auteur de la demande dans sa lettre :

[Le sergent nommé] n’a pas de déclaration écrite par rapport à votre employeur que la conversation aurait été au téléphone en ce qui concerne votre plaignant du [numéro de dossier].

[3]  L’auteur de la demande (désormais l’appelant) a interjeté appel de la décision quant à l’accès.

[4]  Pendant la médiation, l’appelant a fait savoir au médiateur qu’à son avis, il devait y avoir des documents pertinents supplémentaires. Il a précisé qu’il demandait l’accès aux déclarations de policiers. La police a mené d’autres recherches et localisé quatre déclarations écrites. Comme il est indiqué dans sa lettre de décision supplémentaire, la police a soutenu que ces documents supplémentaires étaient soustraits à l’application de la Loi en vertu du paragraphe 52 (3) (emploi ou relations de travail). À la fin de la médiation, comme il est indiqué dans le rapport de médiation, seules quatre déclarations écrites décrites dans ce rapport comme étant quatre notes de service restaient en cause.

[5]  La médiation n’ayant pas permis de régler le différend, l’appel est passé au stade de l’arbitrage, dans le cadre duquel un arbitre mène une enquête en vertu de la Loi .

[6]  Pour commencer, j’ai envoyé un avis d’enquête énonçant les faits et les enjeux de cet appel à la police, qui a fait des observations. J’ai ensuite envoyé à l’appelant un avis d’enquête avec une copie des observations de la police. L’appelant a répondu en présentant ses propres observations. Il a demandé que des parties de ses observations ne soient pas divulguées par souci de confidentialité.

[7]  Reste en litige dans cet appel la demande d’accès de l’appelant aux déclarations écrites faites à l’enquêteur dans le cadre de l’étude de sa plainte. Comme il est précisé plus haut, la police a fait savoir qu’il n’y avait eu aucun rapport écrit de l’employeur de l’appelant, car l’agent de la Section des normes professionnelles chargé de l’enquête sur la plainte avait obtenu les renseignements lors d’une conversation téléphonique.

[8]  Dans la présente ordonnance, je conclus que les renseignements demandés par l’appelant ont été créés à la suite de sa plainte et qu’ils sont soustraits à l’application de la Loi en vertu de la disposition 1 du paragraphe 52 (3). L’appel est rejeté.

DOCUMENTS

[9]  Quatre notes de service.

EXPOSÉ

Les documents sont-ils soustraits à l’application de la Loi en vertu du paragraphe 52 (3)?

[10]  Le paragraphe 52 (3) est libellé comme suit :

Sous réserve du paragraphe (4), la présente loi ne s’applique pas aux documents recueillis, préparés, maintenus ou utilisés par une institution ou pour son compte à l’égard de ce qui suit :

1.  Les instances ou les instances prévues devant un tribunal judiciaire ou administratif ou une autre entité en ce qui a trait aux relations de travail ou à l’emploi d’une personne par l’institution.

2.  Les négociations ou les négociations prévues, en ce qui a trait aux relations de travail ou à l’emploi d’une personne par l’institution, entre l’institution et une personne, un agent négociateur ou une partie à une instance ou à une instance prévue.

3.  Les réunions, les consultations, les discussions ou les communications, en ce qui a trait aux relations de travail ou à des questions en matière d’emploi, dans lesquelles l’institution a un intérêt.

[11]  Si le paragraphe 52 (3) s’applique aux documents et qu’aucune des exceptions prévues au paragraphe 52 (4) ne s’applique, les documents sont soustraits à l’application de la Loi.

[12]  Pour que la collecte, la préparation, le maintien ou l’utilisation d’un document se fasse « à l’égard » des sujets mentionnés aux dispositions 1, 2 ou 3 de ce paragraphe, il doit être raisonnable de conclure qu’il existe un rapport quelconque entre eux [1] .

[13]  L’expression « relations de travail » s’entend des relations entre une institution et ses employés régies par la législation sur les négociations collectives, ou de relations semblables. L’expression « relations de travail » n’est pas limitée au contexte des relations entre un employeur et ses employés [2] .

[14]  L’expression « emploi d’une personne » désigne la relation entre un employeur et un employé. L’expression « questions en matière d’emploi » renvoie aux questions liées aux ressources humaines ou aux relations de travail découlant du rapport entre un employeur et un employé autres que celles régies par la négociation collective [3] .

[15]  Si le paragraphe 52 (3) s’appliquait au moment où les renseignements ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés, il ne cesse pas de s’appliquer à une date ultérieure [4] .

[16]  Le paragraphe 52 (3) peut s’appliquer lorsque l’institution qui a reçu la demande n’est pas la même que celle qui a initialement recueilli, préparé, maintenu ou utilisé les documents, même si l’institution initiale est assujettie à la Loi  [5] .

[17]  Le paragraphe 52 (3) n’exclut pas tous les documents concernant les actes ou les omissions d’un employé uniquement parce que cette conduite pourrait donner lieu à un litige civil dans lequel la Couronne pourrait être reconnue responsable des torts causés par ses employés [6] .

[18]  Les documents que le paragraphe 52 (3) soustrait à l’application de la Loi ont trait à des questions où l’institution agit à titre d’employeur et qui concernent des modalités d’emploi ou à des questions touchant les ressources humaines. Les questions en matière d’emploi sont distinctes des questions touchant les actes des employés [7] .

Disposition 1 du paragraphe 52 (3) : Instances devant un tribunal judiciaire ou administratif

[19]  Pour que la disposition 1 du paragraphe 52 (3) s’applique, l’institution doit démontrer que :

  1. les documents ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés par elle ou pour son compte;
  2. les documents ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés à l’égard d’instances ou d’instances prévues devant un tribunal judiciaire ou administratif ou une autre entité;
  3. les instances ou les instances prévues ont trait aux relations de travail ou à l’emploi d’une personne par l’institution.

Observations de la police

[20]  La police fait valoir que les documents sont soustraits à l’application de la Loi en vertu du paragraphe 52 (3).

[21]  Elle explique que le Bureau du directeur indépendant de l’examen de la police (BDIEP) a acheminé la lettre de plainte de l’auteur de la demande à la Section des normes professionnelles de la police d’Ottawa.

[22]  La police explique :

[Traduction]

La plainte de l’auteur de la demande avait trait à des allégations de recours excessif à la force contre lui de la part d’un policier d’Ottawa. Le BDIEP a classé cette plainte comme étant une plainte au sujet de la conduite d’un agent, en vertu de l’alinéa 61 (5)  a) et du paragraphe 66 (1)  de la Loi sur les services policiers  [8] . Pour faire suite à cette plainte, la Section des normes professionnelles avait entamé une enquête conformément aux dispositions de la Loi sur les services policiers  [LSP ] concernant une allégation d’infraction au Code de conduite, c’est-à-dire « l’exercice illégal ou injustifié d’un pouvoir, du fait qu’il a fait usage de force injustifiée à l’égard d’un prisonnier ou d’une autre personne avec qui il est entré en contact dans le cadre de ses fonctions ».

Dans le rapport de la Section des normes professionnelles, l’agent chargé de l’enquête a documenté le fond de l’allégation, son entrevue avec l’appelant et sa tentative de conclure un règlement à l’amiable, […]. De toute évidence, le dossier de plainte de la Section des normes professionnelles est relié directement à la conduite de l’enquête, qui aurait pu aboutir à une instance devant un tribunal administratif ou une autre entité. Le rapport d’enquête aurait pu manifestement avoir une incidence sur l’issue de l’enquête de la Section des normes professionnelles, car il porte directement sur la conduite du ou des policiers et documente leurs gestes. Ce rapport aurait pu être déposé en preuve lors d’une « instance devant un tribunal administratif ou une autre entité » et l’aurait été.

Les réponses des policiers portent sur une enquête de la Section des normes professionnelles et ont trait directement à la conduite des policiers impliqués dans l’incident qui fait l’objet de la demande. La police a employé l’expression « enquête interne » pour ce type d’enquête. Les réponses des policiers sont le rapport ayant trait à l’enquête de la Section des normes professionnelles et les conclusions sur la conduite des policiers impliqués ainsi que les dispositions du Code de conduite inclus dans la LSP . Elles représentent les documents en cause, qui ont trait à des mesures disciplinaires éventuelles contre les policiers concernés, et les réunions, discussions et communications entre la Section des normes professionnelles et les policiers nommés étaient des réunions, discussions et communications sur des questions en matière d’emploi.

[23]  D’après la police, une copie d’un « rapport d’enquête » remise à l’appelant contenait un sommaire complet des réponses reçues de la part des policiers ayant participé à l’enquête.

Observations de l’appelant

[24]  L’appelant fait valoir qu’il aurait dû avoir accès aux réponses écrites fournies pendant l’enquête sur sa plainte. Il explique :

… Je ne cherche pas les notes qu’auraient prises les policiers en question le jour même ou se sont passes les évènements, mais bien leurs réponses écrites fournies subséquemment au [sergent nommé] dans le cadre de son enquête.

Le résumé faits par le [sergent nommé] des réponses écrites fournies par quatre policiers et par un gestionnaire fédéral occupe sept pages et demie dans le rapport du [sergent nommé] et contient plus de 2 000 mots. II y a donc lieu de croire que le contenu des réponses écrites que je cherche à obtenir m’a déjà été largement communique dans le rapport du [sergent nommé].

[25]  Dans la partie de ses observations qu’il a demandé de garder confidentielle, il explique ses réserves concernant la nature de certains éléments de preuve décrits dans le « rapport d’enquête » et qui, selon lui, démontrent pourquoi il y a lieu de lui divulguer les réponses écrites, le cas échéant.

[26]  Dans sa conclusion, il affirme également :

Le Service de police d’Ottawa devrait pouvoir me fournir les réponses écrites des quatre policiers, ne serait-ce qu’en version caviardée, parce qu’il m’a déjà communiqué le contenu de ces réponses, qui ont été résumes par le [sergent nommé] dans son rapport d’enquête.

Analyse et conclusion

Première partie : recueillis, préparés, maintenus ou utilisés

[27]  Les quatre notes de service sont les réponses écrites du policier qui fait l’objet de la plainte (le « policier intimé ») ainsi que celles des témoins de la police produites pendant l’enquête sur la plainte, qui sont résumées dans le « rapport d’enquête ». À mon avis, ces documents ont tous été recueillis et préparés en vue de tenir une enquête sur la plainte de l’appelant concernant la conduite d’un policier. J’estime que ces documents ont été recueillis ou préparés par la police. Je considère donc que la première partie du critère prévu à la disposition 1 du paragraphe 52 (3) a été respectée.

Deuxième partie : instances devant un tribunal judiciaire ou administratif

[28]  Le mot « instance » s’entend d’un processus de règlement de différends ou de plaintes par un tribunal judiciaire ou administratif ou une autre entité qui a le pouvoir, en vertu d’une loi ou d’une entente ayant force obligatoire ou encore par consentement mutuel, de trancher les questions en litige. Pour qu’une instance soit « prévue », il doit s’agir de plus qu’une possibilité vague ou théorique. Il faut qu’il y ait eu une chance raisonnable qu’une telle instance ait lieu au moment où les documents ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés. Un « tribunal administratif » s’entend d’un organisme qui a le mandat légal de régler les différends entre des parties et de rendre une décision qui touche les droits ou les obligations juridiques des parties. Une « autre entité » désigne un organisme ou un particulier qui préside des instances différentes de celles dont s’occupent les tribunaux judiciaires et administratifs, mais faisant partie de la même catégorie d’instances. Pour être considéré comme une « autre entité », l’organisme ou le particulier doit avoir le pouvoir de diriger des instances et le pouvoir, en vertu d’une loi ou d’une entente ayant force obligatoire ou encore par consentement mutuel, de trancher les questions en litige.

[29]  Le CIPVP a toujours statué que les instances découlant de plaintes déposées en vertu de la LSP  représentent des instances devant un « tribunal administratif ou une autre entité » en vertu de la disposition 1 du paragraphe 52 (3) . J’estime donc que les documents pertinents créés à la suite de la plainte et versés dans le dossier de plainte ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés à l’égard d’instances prévues en vertu de la LSP . Je juge donc que la deuxième partie du critère de la disposition 1 du paragraphe 52 (3)  a été respecté en ce qui a trait aux documents pertinents.

Troisième partie : relations de travail ou emploi

[30]  Pour que soit respectée la troisième partie du critère de la disposition 1 du paragraphe 52 (3), la police doit établir que les instances ou instances prévues ont trait aux relations de travail ou à l’emploi d’une personne par l’institution.

[31]  À mon avis, les audiences disciplinaires tenues en vertu de la LSP  ont trait à l’emploi d’une personne par l’institution aux fins de la disposition 1 du paragraphe 52 (3) . Je reprends donc les conclusions de l’ancien commissaire adjoint Tom Mitchinson, dans l’ordonnance M-835, selon lesquelles les sanctions disciplinaires imposées aux policiers en vertu de la LSP  « doivent raisonnablement être considérées comme des actes qui ont trait à l’emploi ».

[32]  J’estime donc que la troisième partie du critère de la disposition 1 du paragraphe 52 (3) est respectée, car les documents ont été recueillis, préparés, maintenus ou utilisés à l’égard d’instances ou d’instances prévues concernant l’emploi du policier.

[33]  Pour conclure, j’estime que les trois parties du critère de la disposition 1 du paragraphe 52 (3) ont été respectées dans le cas des documents pertinents. J’estime également que ces documents, qui ont été créés à la suite de la plainte, ne sont pas visés par les exceptions énoncées au paragraphe 52 (4). Je confirme donc la décision de la police selon laquelle les documents pertinents créés à la suite de la plainte sont soustraits à l’application de la Loi en vertu de la disposition 1 du paragraphe 52 (3).

ORDONNANCE

Je confirme la décision de la police et je rejette l’appel.

Original Signed by:

 

Le 10 juillet 2018

Steven Faughnan

 

 

Arbitre

 

 

 



[1] Ordonnance MO-2589; voir également Ministry of the Attorney General and Toronto Star and Information and Privacy Commissioner, 2010 ONSC 991 (Div. Ct.).

[2] Ontario (Minister of Health and Long-Term Care) v. Ontario (Assistant Information and Privacy Commissioner), [2003] O.J. No. 4123 (C.A.); voir également l’ordonnance PO-2157.

[3] Ordonnance PO-2157.

[4] 4 Ontario (Solicitor General) v. Ontario (Assistant Information and Privacy Commissioner) (2001), 55 O.R. (3d) 355 (C.A.), autorisation de pourvoi refusée [2001] A.C.S.C. n° 507.

[5] Ordonnances P-1560 et PO-2106.

[6] 6 Ontario (Ministry of Correctional Services) v. Goodis (2008), 89 O.R. (3d) 457, [2008] O.J. No. 289 (Div. Ct.).

[7] Ministry of Correctional Services, précitée.

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